La loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 permet aux salariés, quelle que soit la taille de l’entreprise, de choisir, sur demande et en accord avec l’employeur, de renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos acquises au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2025. Le point sur cette nouvelle possibilité avec Me Caroline Hénot, avocate associée, et Me Régis Debroise, avocat, au sein du cabinet Cornet Vincent Ségurel.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Ce dispositif permet aux salariés de renoncer à certains repos acquis du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025 contre paiement d’un salaire majoré, à l’image du paiement des heures supplémentaires.
La majoration de salaire est au moins égale au taux de la majoration de la première heure supplémentaire applicable dans l’entreprise.
Le versement de cette rémunération supplémentaire bénéficie d’un traitement fiscal et social avantageux, de sorte que ce dispositif s’inscrit dans une volonté du législateur de permettre à l’employeur un nouveau levier de souplesse dans l’organisation de son effectif et surtout d’assurer au salarié un gain en termes de pouvoir d’achat.
Caroline Hénot et Régis Debroise : La loi n’exclut aucune entreprise du secteur privé qui fait application du droit du travail. Le « Questions-réponses » diffusé par l’exécutif précise que les professions agricoles sont aussi concernées.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Les salariés doivent répondre à une des deux conditions suivantes :
bénéficier de journées ou demi-journées de repos en application d’un accord ou d’une convention collective instituant un dispositif de réduction du temps de travail maintenu en vigueur en application de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;
bénéficier de jours de repos conventionnels dans le cadre des articles L. 3121-41 à L. 3121-47 du Code du travail (soit être soumis à un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine).
Ce qui exclut de factoles salariés au forfait-jour (qui bénéficient déjà d’une faculté comparable).
Les salariés à temps partiel qui ne peuvent, par définition, travailler au-delà de la durée légale de travail, ne peuvent en bénéficier à l’exception de ceux qui alternent périodes de travail à temps plein et périodes de suspension du contrat de travail pour besoins de la vie personnelle.
Les salariés en arrêt maladie y sont éligibles dès lors que les repos ont été acquis sur la période prévue par la loi.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Seuls les journées ou demi-journées acquises comme RTT sont monétisables, ce qui exclut par exemple les congés payés ou les jours de repos hebdomadaire.
Caroline Hénot et Régis Debroise : La loi ne le précise pas mais le gouvernement a répondu par la négative, étant précisé que la monétisation des droits affectés au CET est déjà prévue, soit par l’accord le mettant en place, soit par le Code du travail (C. trav., art. L. 3151-3).
Caroline Hénot et Régis Debroise : Oui, la loi ne fixe pas de limites toutefois l’employeur devra veiller à ce que ce rachat soit compatible avec le respect des durées maximales de travail et des temps de repos.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Oui, la loi prévoit expressément que le rachat s’opère « en accord avec l’employeur ». L’employeur est donc libre d’accepter le rachat en tout ou partie.
Caroline Hénot et Régis Debroise : La loi ne prévoit aucun formalisme, il reviendra donc à chaque entreprise d’instituer des process adéquats.
Caroline Hénot et Régis Debroise : La loi n’institue aucune limite de cet ordre, le salarié pourra donc présenter autant de demandes qu’il l’estime nécessaire.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Les journées ou demi-journées monétisées bénéficient d’une exonération fiscale en application de l’article 81 quater du Code général des impôts. Cette exonération est limitée à un plafond annuel de 7 500 euros.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Le régime est calqué sur celui des heures supplémentaires, soit :
réduction des cotisations salariales prévue par l’article L. 241-17 du Code de la sécurité sociale ;
déduction forfaitaire des cotisations patronales de 1,50 euro pour les entreprises de moins de 20 salariés (CSS, art. L. 241-18).
Il est utile de signaler que pour les entreprises de 20 à 250 salariés, la déduction forfaitaire de 0,50 euro prévue par la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 n’est pas intégrée dans l’article L. 241-18 du Code de la sécurité sociale : les RTT monétisés n’y ouvrent donc pas droit.
Caroline Hénot et Régis Debroise : Non, le contingent d’heures supplémentaires n’est pas affecté par les heures ayant donné lieu à rachat de RTT.
Caroline Henot Régis Debroise Propos recueillis
avocate au barreau de Lille, avocat au barreau de Lille, par Valérie Boccara
associée,Cornet Vincent Ségurel Cornet Vincent Ségurel journaliste